Chine : des financements massivement tournés vers l’aval
Si on dit souvent de la Chine qu’elle est l’empire « du Milieu », force est de constater que cela ne s’applique pas aux investissements dans les start-up opérant le long de la chaîne agroalimentaire.
Le financement y reste massivement dirigé vers l’aval, suivant en cela les tendances d’un marché « se concentrant sur l’offre de nouvelles expériences alimentaires et de business models innovants, peu encore sur les innovations technologiques », note Agfunder news dans son premier « Agrifood China Funding Report » publié en septembre dernier et élaboré en collaboration avec l’accélérateur BitsxBites.
Sur les 177 opérations et 1,8 Mds $ d’investissements en 2017 dans le secteur, les start-up à l’aval de la chaîne ont ainsi représenté « 84 % de l’activité et 94 % de l’ensemble des investissements ». Le reflet d’un marché où, sous l’effet d’une classe moyenne grandissante et des récents scandales sanitaires « la volonté des consommateurs de payer plus pour des produits de qualité et haut de gamme » est devenu un thème clé.
D’un pays totalisant également 40 % des transactions du e-commerce mondial et où Alibaba et Tencent comptent désormais pour 90 % de l’achat de nourritures en ligne.
Les géants technologiques chinois (Baidu, Alibaba, Tencent) ne sont d’ailleurs pas étrangers à ce mouvement vers l’aval, représentant à eux seuls près de 741 M$ d’investissement dans le secteur en 2017. L’épicerie en ligne représente près de 45 % de l’ensemble des investissements (814 M$), tiré par les levées de fonds d’acteurs majeurs comme MissFresh (kit repas en ligne) ou Yiguo (vente en ligne de produits frais).
Elle est suivie par le retail (32 % des investissements pour 564 M$) avec des opérateurs comme Vingoojuice (une machine automatisée de pressage de jus d’orange ayant levé 60 M$ et déjà présente dans 170 villes dans le pays).
A contrario, le domaine des logiciels de gestion de fermes ou des capteurs agronomiques totalisent à peine 16 M$ d’investissements, quand les nouvelles marketplaces atteignent 43 M$. En tout, l’amont agricole n’a rassemblé que 106 M$ d’investissements en 2017. « La dispersion des terres agricoles et la complexité des chaînes d’approvisionnement empêchent les start-up de l’amont de prendre de l’ampleur en Chine. Les agriculteurs moins instruits tardent également à adopter les technologies », note Agfunder pour expliquer cette différence.
Mais la tendance pourrait s’inverser dans les années à venir. « La tendance que nous avons observée est que si les « mega-deals » en food, e-commerce et innovation retail ont occupé le devant de la scène ces dernières années […] nous voyons émerger un nombre significatif de start-up tournées vers les problèmes systémiques de la chaîne de valeur agroalimentaire », estime Isabelle Decitre, PDG de ID Capital (voir entretien ci-dessus).
Dans un futur plus ou moins proche, ces nouveaux standards alimentaires « vont descendre le long de la chaîne d’approvisionnement, créant un besoin de traçabilité et de transparence jusqu’aux exploitations agricoles », relève Agfunder qui y voit « une énorme opportunité ».