En Californie, dans un centre de formation à l'agtech
Par notre correspondante en Californie, Mahaut Launay
La « Ferme du futur » n’a de tapageur que le nom. Ces deux bâtiments modestes du West Hills College de Coalinga, une université publique locale, sont entourés de champs expérimentaux, écrasés par la chaleur typique des étés de la vallée de San Joaquin, le «potager de l’agriculture californienne».
Cet établissement de l’Ouest américain propose des cursus en agriculture, d’un à quatre ans, destinés à former employés agricoles (en premier lieu) et étudiants à l’agtech, en vue de son adoption sur la ferme. Depuis 2001, 500 étudiants sont passés par ces cours.
« Ici on ne forme ni des universitaires ni des ingénieurs : on forme des techniciens», insiste Terry Brase, directeur de la Ferme du futur. Car « ce ne sont pas les ingénieurs (du constructeur) qui vont brancher, régler, faire marcher ce Veris (marque de capteur, ndlr) sur la ferme, ce sont les employés de l’exploitation ».
Or, « pour cela, ils n’ont pas besoin d’un diplôme d’ingé », ajoute-t-il, en montrant cet appareil de mesure et cartographie de la salinité du sol. C’est l’un des outils qu’ils mettent les étudiants au défi de bricoler pendant leur formation.
Des drones – certains sont incomplets –, un assortiment de capteurs de sol, des tablettes en tous genres et un accent mis sur l’open source…: le cursus insiste sur l’analyse critique, la capacité à résoudre des problèmes, à bidouiller ; théorie et technique ne sont qu’une base.
« On ne veut pas “former” à une technologie donnée, on veut éduquer des professionnels pour qu’ils puissent ensuite adopter et adapter des produits technologiques dans leur exploitation en fonction du contexte», résume ce formateur. Lui qui a lancé une formation à l’irrigation de précision en Ohio, il y a 25 ans note : « Ce n’est que lorsque le nombre de techniciens formés a atteint une masse critique que l’innovation a vraiment décollé, en Ohio. »
Paradoxalement, la Californie n’est pas très branchée “tech”. Cause ou conséquence, West Hills College peine actuellement à... recruter des candidats. 90 étudiants sont inscrits en ce début d’année scolaire, mais il faudra d’autres efforts en cours d’année pour remplir ces modules, offerts plusieurs fois par an.